mardi 29 octobre 2013

Arlette, le développement durable et la notion d'espace privé. Part 1

Quand je suis arrivée dans les Alpes-Maritimes, j'ai découvert que plus de la moitié des logements étaient fermés une grande partie de l'année. Des volets bien clos, des jardins hebdomadairement entretenus par des cohortes de jardiniers, des piscines qu'un personnel qualifié maintenait prêtes-à-plonger, le tout derrière des portails portant diverses plaques de sociétés de surveillance et d'alarmes.
J'ai posé la question à une amie qui habite un rez-de-chaussée sur mer à Cannes, dans une villa ancienne. "les voisins du dessus ne sont pas trop bruyants?" "ils viennent parfois deux semaines par an, mais je ne les ai pas croisés depuis 2008".
Voilà le profil du département. Des milliers de mètres carrés habitables, aménagés grand confort, fermés plus de 10 mois sur 12.
Quel plaisir, quelle satisfaction retire-t-on de la "possession" de biens dont on ne jouit pas, d'espaces dont on prive les autres? Est-ce de régler les factures, les impôts, les taxes attachées à ces résidences inhabitées qui procure aux propriétaires des moments de bonheur ineffables?

Le premier thème du manuel de géographie des nouveaux lycéens qui arrivent en seconde traite de la problématique suivante: la planète peut-elle absorber l'augmentation de population prévue d'ici à 2050?
La réponse est clairement "non" si on se base sur les projections des démographes et surtout, si on ne change pas nos pratiques. Ce qui permet d'enchaîner sur le grand défi à relever: celui du développement durable.

Comment expliquer le développement durable à des enfants qui disposent chacun d'une chambre très spacieuse, avec terrasse et salle de bain privée, d'une herbe toujours verte et parfaitement tondue, et d'une eau toujours bleue pour se rafraîchir si ils ont séjourné trop longtemps loin de la clim?
Comment les préparer à cet avenir où leur survie dépendra de leur capacité à partager ?
Partager l'espace de vie, partager les ressources, partager les jouets, les parkings, les moyens de transport...quand ils ne pensent qu'à accumuler, à posséder pour eux seuls, à mettre leur nom sur une porte de chambre, sur un objet, un livre, un compte?

Comment leur faire expérimenter le plaisir, le bonheur de partager, de prêter, et abandonner l'idée d'exercer un pouvoir quelconque sur les autres par la possession des objets?

Certains sont dotés de parents intelligents, qui ont mis en place au sein de leur famille des pratiques de partage des espaces et des objets qui permettent à chacun d'augmenter son niveau de confort sans priver l'autre.
D'autres n'ont pas cette chance. Ils regarderont derrière la vitrine le jouet qui appartient au frère ou à la soeur, et dont ils ne peuvent pas se servir. Parce que dessus, il y a un autre nom écrit.

Le développement durable, c'est pas acheter du thé bio à Carrefour, et porter son linge au pressing écolo-qui-lave-à-l'eau. C'est d'abord enseigner à ses enfants à remplacer les pronoms possessifs par des indéfinis.

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